lundi 23 novembre 2009

PRETTY LANDSCAPE IN BURUNDI

A défaut de photos – qui sont décidemment impossibles à charger avec la connectivité internet de l'université! – laissez-moi faire montre de mes talents littéraires, dignes d'un Balzac, à n'en pas douter, pour vous décrire les charmants paysages du Burundi (j'en profite pour tester la présentation du futur guide touristique que je compte publier sur le pays d'ici quelques mois, car rappelez-vous que mon défi est de faire doubler le nombre de touristes au Burundi d'ici à deux ans! Et je compte évidemment sur vous pour m'y aider!).

Avant toutes choses, il me faut vous parler des couleurs. Je vous l'avez déjà écrit lors de mon premier billet, le Burundi est un pays en rouge et vert, à l'image de son drapeau. Plus précisemment, il faut s'imaginer une terre rouge lie-de-vin, que saupoudre le vert tendre des feuilles de bananiers et des plants de haricots.

Le Burundi, avec ses 360 habitants (ou à peu près) au kilomètre carré malgré un taux d'urbanisation d'environ 20%, est le pays le plus densément peuplé d'Afrique. Cette densité a évidemment des conséquences très visibles sur le paysage, au premier rang desquelles la très faible présence de forêt. Presque chaque centimètre carré du pays est exploité par l'homme: quelques centaines de kilomètres de routes et de pistes, quelques dizaines d'autres occupés par l'espace urbain en expansion, et le reste entièrement cultivé. Les cultures les plus caractéristiques ici sont sans aucun doute les plantations de café (50% du montant des exportations, mais une denrée rare ici, que très peu de Burundais consomment), les champs de bananiers et de haricots ( les 2 éléments de base de l'alimentation). S'y ajoutent par-ci par-là quelques plants d'eucalyptus, dont la couleur plus métallisée donne parfois au paysage des allures de science fiction. La nature « sauvage » qui a tant fait pour la réputation du tourisme en Afrique, n'a pas sa place dans un petit pays comme le Burundi, où la terre nourricière est un bien trop précieux. Dès lors la campagne burundaise prend parfois des airs de campagne aveyronnaise (vous allez dire que c'est obsessionnel chez moi!), avec son atmosphère tranquille, son relief valloné et sa surface partout maîtrisée. Mais la ressemblance s'arrête là, notamment en raison de l'habitat qui parsème les paysages ruraux burundais, avec ses maisons en terre rouge, aux toits de chaume ou de tôles, dont les façades sont souvent garnies de rangs de haricots séchant au soleil,

Par ailleurs, la disparition progressive de la forêt au Burundi a connu une accélération certaine avec la fin de la guerre civile. Les rebels ayant pris l'habitude de se réfugier dans les zones de forêt dense, l'effort de sécurisation du pays a conduit à une déforestation massive. Aujourd'hui encore, même si cela semble un détail, on déracine les haies qui cernaient autrefois les maisons coloniales, pour construire des murs de briques, couronnés de fils de fer barbelés ou de simples tessons de bouteilles coulés dans le ciment, et jugés plus fiables pour se protéger des intrus.

Cette déforestation à grande échelle a elle-même eu pour conséquences l'aggravation de l'érosion des collines et la dégradation des routes et pistes, ravinées par les pluis battantes qui s'abattent sur le pays lors de la saison des pluies. Autant vous dire que notre vieux char soviétique (dont je tâcherai de mettre une photo en ligne, parce que ça vaut franchement le détour), avec ses chambres-à-air couvertes de 7 à 8 rustines en moyenne, souffre le martyr! Les types du garage nous aiment déjà!

Une autre conséquence, notable dans les assiettes cette fois, est l'abandon presque total de la pratique de la chasse. En effet, avec la disparition de leur habitat naturel, ce sont des centaines d'espèces animales qui ont déserté le pays. Je sais qu'avec ce dernier détail, je compromets fortement les chances de visite de mes parents chéris, mais heureusement, la Tanzanie voisine recèle des merveilles en la matière!

J'espère que ces quelques détails vous auront donné envie de venir découvrir les paysages pittoresques du Burundi!

vendredi 20 novembre 2009

INVITE ME IN BURUNDI

Les Burundais ont une notion très particulière de l'invitation Lorsque l'on « invite » quelqu'un, à boire une bière, à dîner, à partir en week-end, celui qui invite a le devoir absolu de tout prendre en charge, notamment au niveau financier. L'exemple le plus significatif: on ne partage jamais une addition ici, sauf très rarement au cabaret (= bar – rien à voir avec le Lido, ne vous faites pas d'illusion!) lorsque l'un se charge de payer les boissons et l'autre les brochettes.

Ce sens très aigü de l'invitation donne évidemment lieu à quelques quiproquos – pas insupportables mais un peu lassants à la longue – lorsque la muzungu non initiée que je suis, habituée à proposer régulièrement à ses amis et collègues d'aller boire un coup après le travail, (je vois d'ici votre hochement de tête approbateur!) se retrouve à devoir payer systématiquement l'addition. Au début, avec la bière à 60 centimes d'euros (les 75 centilitres bien sûr! Ici, le demi n'existe pour ainsi dire pas: il y a bien l'Amstel Bock – sorte de bière d'abbaye – en 33 cl, mais la coutume veut qu'on en commande toujours 2!), on se laisse griser. Mais au fur et à mesure, lorsqu'on vient à être toujours celui qui règle la facture (ce quelqu'un inclut aussi Maxi et Laura), on commence à se poser des questions. La première qui nous vient à l'esprit a souvent trait à notre statut de bazungu (qui à l'origine veut dire « ceux qui ont de l'argent »). Nous prennent-ils donc pour des vaches à lait parce que nous sommes blancs?

C'est là que l'on se rend compte de nos mauvais réflexes! Car non, cela n'a en fait que peu à voir avec notre condition de bazungu, mais bien avec cette fameuse coutume de l'invitation. Ce que nous ne savions pas, c'est que celui qui propose est considéré comme celui qui invite! C'est aussi, à mon avis, ce qui explique pourquoi les Burundais prennent assez peu l'initiative de nous proposer de sortir. Il faut dire aussi que nous avons (ou avions, car avec le début des cours, il va falloir ralentir un peu la cadence!) un rythme de vie très différent du leur, en sortant presque tous les soirs.

Cela étant, ce constat doit être nuancé, car certains Burundais ont l'initiative facile quand il s'agit de nous demander de les inviter ;-). Même si je suis sûre qu'il s'agit d'une habitude bien d'ici, je crois aussi que ces demandes fusent plus facilement parce que nous sommes bazungus. Là, deux solutions: soit rire un bon coup et répondre « ejo » (plus tard/ un jour), soit accéder à la demande, juste pour cette fois, en espérant recevoir la pareille un de ces jours!

Notre prochain défi sera donc d'apprendre comment proposer sans avoir l'air d'inviter. Une tâche longue et complexe, qui sera certainement l'occasion de nombreux échecs, que la bière payée viendra heureusement apaiser ;-)

lundi 9 novembre 2009

Ngozi's Anatomy E02S01

D'abord très surpris l'un comme l'autre de la bonne tournure que prenaient les évènements, Laura et Maximo ont fini par admettre qu'ils se trouvaient très bien ensemble. Alors que Laura vient mettre un peu de piquant dans la vie sentimentale jusqu'ici plutôt raisonnable de Maxi, ce dernier ne cesse de surprendre Laura par ses délicates attentions. Pendant ce temps, Maria flirte toujours!


Evidemment, le bonheur des uns faisant le malheur des autres, Amidou, le soupirant de Laura, pourtant réputé pour avoir été un coureur de haut vol (Nunguka), s'est trouvé fort attristé lorsqu'il a découvert la relation que celle-ci entretenait avec Maximo. Jusqu'ici toujours près à faire les 400 coups avec Laura, il a préféré prendre ses distances quelques jours, le temps de se consoler avec une de ses amies, la charmante Jeanne.


Heureusement, après ces quelques jours de tension et les précieux conseils dispensés par Maria (autour d'une Amstel, ça passe toujours mieux), la situation est rentrée dans l'odre. La désormais célébrissime équipe « AmiNe (Ami de Amidou, Ne de Nena) » a refait des siennes, notamment en introduisant une chèvre (vivante bien sûr) dans la collocation. L'animal, qui répond au doux nom de Viernes, squatte le jardin de la maison, en attendant d'être dégustée en brochettes ce vendredi (d'où son nom), à l'occasion de la célébration de la soutenance de mémoire d'une amie de l'université. Mais la transformation de la maison en « ferme des animaux à l'agonie » ne faisait que commencer.


En effet, pour consoler Maria, très affectée par le sort réservé à Viernes, Laura a très gentiment décidé de compenser cette perte tragique en prenant un animal domestique. Elle a donc dégoté un adorable petit lapin au marché, qu'elle a nommé Gustavo, en l'honneur du célébère crocodile mangeur d'hommes qui sévissait au Burundi dans les années 80-90. Or, après un bon petit nettoyage de rigueur, Gustavo s'est presque littéralement décomposé, et après quelques heures, a finalement rendu l'âme. Qui a dit qu'un bain n'a jamais tué personne! Cette disparition foudroyante a rappelé avec émotion à Maria les heures de gloire de sa soeur Gersende, autrefois grande prêtresse des sacrifices animaliers (cochon d'inde tombé du piano ou grillé au soleil, poissons rouges congelés, canard éborgné, etc.). Les déboires de la méningerie ne s'arrête évidemment pas là: le lendemain du décès de Gustavo, Gabriel, le gardien de nuit, a apporté un coq à la maison, baptisé Francesco, qui finira sans doute en bouillon aux alentours de Noël. Enfin, la cerise sur le gâteau: un petit rat a fait son arrivée à la maison, grignottant allègrement nos repas. Il a donc bien fallu se débarrasser de cet indésirable visiteur, qui a tristement fini la tête dans une tapette.


Quel autre animal tombera sous le coup de la malédiction de la «maison des animaux à l'agonie»? Maria survivra-t-elle a une autre perte ou tentera-t-elle d'aider Francesco le coq à échapper à son terrible destin? La relation de Laura et Maximo sera-t-elle assez forte pour endurer cette nouvelle épreuve? Qu'adviendra-t-il de l'amour naissant entre Jeanne et Amidou? Vous le saurez en lisant le prochain épisode de Ngozi's Anatomy.

BE A LADY IN BURUNDI

Depuis quelques semaines, je me pose souvent la question: fait-il bon ou non être une femme au Burundi? Cette question ne me concerne pas directement car avant d'être femme, je suis d'abord muzungu ici, ce qui me met naturellement à l'écart des contraintes sociales applicables aux femmes burundaises. C'est la loi de la double morale. On emmène les bazungu dans des endroits (notamment en boîte, où il y a 5 filles pour 60 garçons) où l'on emmènerait jamais sa soeur.

Bien sûr, comme me le faisait remarquer le père d'un ami, ici une femme peut étudier, et retrouver ses amis, y compris hommes, dans un cabaret pour partager une bière, à l'inverse de ce qui se passe dans certains autres pays. De fait, les burundaises sont relativement libres de leurs mouvements (avant 20h), beaucoup tiennent des commerces, certaines des cabarets – notamment Persil (oui, oui, c'est bien son nom!), la tollière de notre bar péféré, qui fait les meilleurs brochettes de chèvre de Ngozi! Elles travaillent en réalité plus que les hommes, car en plus de leur activité lucrative quand elles en ont une, ce sont elles qui tiennent le foyer. En effet, dans la culture burundaise, comme dans beaucoup de cultures africaines, la maison est le domaine du féminin. L'homme y est comme un visiteur: autrement dit, il n'y fait rien, surtout pas la cuisine! Même si l'on croise souvent des hommes qui aident leur épouse à éplucher les pommes de terre ou écosser les haricots, cela se passe toujours en dehors des 4 murs de la maison.

D'un point de vue social, les femmes n'ont en général pas de statut propre, elles héritent de celui de leur père puis de leur mari. Car ici la question ne se pose pas: une femme sans mari, c'est une femme dont personne ne veut. Donc toutes les femmes descentes doivent se marier, au risque de tomber dans la prostitution. Pour être juste, il faut quand même dire qu'un homme seul est aussi assez mal vu, même s'il est facilement admis qu'il se marie tard, surtout lorsqu'il est instruit. En revanche, l'égalité s'arrête lorsqu'il s'agit d'adultère: si l'infidélité de l'homme, très fréquente, est plus que tolérée, celle de la femme est évidemment inacceptable. Le simple fait, pour une femme , même simplement en couple, de prendre un verre seule avec un autre homme que son conjoint, est inimaginable.

Ce statut socialement inférieur est confirmé par la législation: non seulement il est tout à fait normal que les filles n'héritent rien de leur père, puisqu'elles bénéficieront des biens hérités par leur mari, mais elles n'ont surtout pas d'autorité parentale sur leurs enfants, et n'ont pas non plus le droit à l'initiative pour demander le divorce. Enfin, le catholicisme faisant loi au Burundi, l'avortement est évidemment interdit (comme dans 95% des pays du monde en même temps) et passible d'une peine de prison.

Mais le plus déroutant dans tout cela, c'est que les femmes burundaises, exception faite de celles qui ont étudié, semblent se satisfaire de leur sort. Pour la non-féministe peu convaincue que je suis, cela pose évidemment un certain nombre de questions: ces femmes sont-elles bien conscientes de leurs droits? Si non, cherchent-elles à les connaître et à les faire valoir? Si oui, refusent-elles sciemment l'indépendance? Les hommes, en tout cas, défendent l'idée que leurs femmes sont libres dans la mesure de leurs capacités, et demandent souvent: « plus de liberté pour les femmes, pour faire quoi? ».

De fait, je crois que très peu de femmes burundaises souhaitent pouvoir vivre sans mari. Pour tous les Burundais, la famille est l'élément central de la vie social, même si les relations en son sein n'y sont pas toujours très affectueuses. Mais c'est surtout l'espace de reconnaissance sociale attitré de la femme. En effet, ici la valeur d'une femme se mesure souvent au nombre et à la qualité des enfants qu'elle aura mis au monde. C'est une des raisons, avec son coût exhorbitant et sa faible disponibilité, qui expliquent que la contraception peine à s'installer dans les moeurs. De fait, si une femme n'a pas donné un enfant à son mari dans la première année de son mariage, il est de coutume que la belle-mère s'en mêle et vienne abreuver sa bru de conseils avisés! De même, lorsque l'on recontre des familles de moins de 4 enfants ou moins, il est très probable que l'un des deux parents soit décédé très tôt. Cela étant, la natalité, même si toujours galopante, a tendance à diminuer, notamment du fait de la récente législation qui interdit le travail des enfants, et fait donc drastiquement augmenté leur coût de prise en charge.

Ce qu'il faut quand même accordé aux cultures africaines de la région des Grands Lacs en général, c'est que, contrairement à l'Afrique de l'Ouest et à ses tristement célèbres pratiques d'excision, le plaisir féminin n'est pas tabou (s'il reste confiné dans les limites du mariage, bien entendu!). Un petit exemple assez curieux: au Rwanda, pour augmenter le plaisir des jeunes filles, leur mère allonge manuellement leur clitoris, et ce dès leur petite enfance. Du coup, les rwandaises ont ici la réputation de pouvoir uriner debout, comme les hommes!