mercredi 24 mars 2010

TEACHING IN BURUNDI

Être enseignant est loin d'être un métier de tout repos, surtout quand on débute, et avec pour seule formation une journée express pendant le stage de la DCC. Sans compter que depuis le début de l'année académique, les cours se dispensent un peu à la chaîne ici. J'ai échappé de justesse à 8h de cours par jour. Quand bien même, 4h quotidiennes, cela reste épuisant, surtout lorsqu'il faut les donner en anglais. Je revis ici la même source de fatigue qu'à l'UNESCO, en baignant à égalité dans trois langues différentes (espagnol à la maison, anglais et français au travail).


Néanmoins j'adore enseigner! Je crois que le rapport avec les élèves est ce qui me motive le plus. C'est d'abord un défi de chaque instant, car la responsabilité est grande de « transmettre », non seulement des connaissances mais aussi des méthodes d'analyse. Après des débuts hésitants, j'ai finalement décidé que le plus important, ce n'était pas de leur tout leur dire, mais qu'ils comprennent et retiennent le peu que je tente de leur enseigner (l'avantage de travailler sans programme académique!). Voilà qui n'est pas une mince affaire, surtout lorsque l'on n'est pas professeur de langues de formation. Comme ceux qui me connaissent le savent déjà, j'ai parfois du mal à accepter mes erreurs et mes lacunes (j'entends d'ici vos rires moqueurs « c'est un doux euphémisme! »;-))! Mais devant une classe de 30 élèves pendus à vos lèvres, c'est une véritable épreuve du feu! Heureusement, les élèves sont plutôt tolérants à mon égard. Lorsqu'il me reprennent, j'essaie d'en tirer le positif, car dans une certaine mesure, cela prouve aussi qu'ils suivent le cours et s'intéressent.


Cette relation avec les élèves m'offre aussi d'autres sources de satisfaction. Le surnom (et oui, déjà!) dont ils m'affublent est « kanyeshamba » (qui veut dire « forestier » en kirundi). J'aime ce surnom parce qu'il me donne l'impression de faire un peu partie de leur monde (kirundophone). Ils apprécient beaucoup que je dise quelques mots en kirundi pendant les cours, même si je suis la seule autorisée à le faire, car pour eux, les cours sont exclusivement soit en français soit en anglais! En fait, j'essaie de faire de mon mieux pour les mettre en confiance. Je n'aspire pas à être un de ces professeurs que les élèves craignent. Je mise plutôt sur des cours participatifs, où l'on rigole au moins un peu, parfois sur des thèmes un peu « hors-sujet ». Je me suis retrouvée, alors que j'expliquais pourquoi la phrase « The lion hunted the man and killed it » n'avait pas de sens, à chanter « ce matin, un lapin a tué un chasseur »! Et oui, vous en auriez bien voulu d'une prof comme moi, qui n'a pas peur du ridicule! La difficulté reste de savoir jouer à la fois sur la confiance et le respect, ce qui n'est pas non plus une tâche facile. Il faut parfois se rappeler à l'ordre et montrer aux étudiants qu'un professeur, ce n'est pas un copain!

Par ailleurs, d'un point de vue plus pédagogique, je tâche de faire preuve de patience et de souplesse, en particulier sur les horaires (il n'est pas rare qu'une bonne moitié de la classe arrive avec plus d'une demi-heure de retard, surtout quand il pleut!). Evidemment, j'en profite également car, comme les mêmes que tout à l'heure le savent aussi, la ponctualité ne fait pas vraiment partie de mes principales qualités! Même chose pour les délais de rendu de devoirs, notamment parce que les étudiants de l'université n'ont pas du tout l'habitude de compter sur le contrôle continu. La politique pédagogique en vigueur ici, comme je l'avais déjà évoquée, est un cours intensif d'une semaine presque immédiatement suivi de l'examen de première session. Les seuls cas où les élèves sont amenés à faire de vrais devoirs à la maison, c'est lorsque le professeur, pour gagner deux ou trois heures de cours, les compense en donnant un travail « complémentaire » qu'il mettra théoriquement deux ou trois heures à corriger...

Bien sûr, parfois, la désinvolture de certains me tape sur les nerfs. Dans ces cas-là, je choisis un élève qui a bavardé ou qui est arrivé encore plus en retard que moi (!), et qui subira une gentille moquerie « filée » tout au long du cours! Mais la chose qui me met vraiment hors de moi, et sur laquelle je suis absolument intransigeante, c'est la tricherie, qui leur vaut immanquablement une mauvaise note et une bonne remontée de bretelles! A côté de cela, je n'oublie pas que le secret de la réussite, ce sont aussi les encouragements. C'est pourquoi je m'attache à les féliciter quand ils travaillent bien, à leur montrer que faire des erreurs « à haute voix » , c'est non seulement normal (la première fois bien sûr!) mais aussi profitable à toute la classe, à leur offrir des opportunités de se rattraper quand ils se sont trompés, à leur démontrer qu'on peut apprendre plein de choses à condition de travailler!


mercredi 3 mars 2010

NGOZI'S ANATOMY E04S01: LA VUELTA DE MAXI

La colloc est à nouveau au complet: Maxi est de retour! Après des premiers jours plutôt tendus à Bujumbura, le retour à Ngozi a marqué le retour aux bonnes vieilles habitudes! Il a quand même bien fallu faire rattraper le temps perdu à l'homme de la maison! Car il s'en est passé des choses au mois de janvier!

Carolina s'était en effet trouvé un « amante tinieblo », un jeune français fan de rugby et de scoutisme, mais malheureusement, la romance n'aura duré qu'un temps! A nouveau célibataire, elle se lance à corps perdu dans la gym tonique, ce qui semble lui réussir. La chance veut qu'en plus, elle y rencontre un bel omanien qui répond au doux nom de Yousuf. Peut-être le début d'une grande aventure?

Pendant ce temps-là, en l'absence de son cher et tendre, la douce Laura s'était laissée émoustiller par un visiteur étranger, venu se lancer dans le commerce de café à Ngozi, et qui loge dans l'hôtel chic de Ngozi, le Sckojet, à quelques pas de la maison. L'homme, un dénomé Loay, au physique athlétique et à la crinière féline, est libanais d'origine portugaise et vit depuis 15 ans au Mozambique. Mais la déroute hormonale a tourné court car en plus de ses lubies astrologiques, le ténébreux « salvaje » est marié et sa femme attend un bébé. Heureusement que Maxi est de retour!

Maria, quant à elle, a enfin commencé les cours dans sa faculté. Elle est déjà qualifiée par ses étudiants de «prof trop cool »! Mais il faut quand même bien admettre qu'elle a un petit faible pour les étudiants de 3e et 4e année avec qui les cours tournent souvent à la franche partie de rigolade! Après une semaine « noire », où sa légendaire maladresse lui a vallu de se prendre tour à tour une barre d'échaffaudage dans l'oeil, le coffre de la voiture sur la tête, une table basse dans le tibia et un retard de deux heures en cours, la chance est de retour! La seule ombre au tableau a été le départ de son ami Saïdi qui, fraîchement diplômé et avec distintion, est parti à Bujumbura pour chercher du travail. Heureusement, comme Maria descend régulièrement à Buja, ils se sont promis de rester en contact!

Qu'adviendra-t-il de la relation entre Yousuf et Carolina? Maxi et Laura laisseront-ils finalement s'épanouir l'amour qui bouillonne entre eux? Maria conservera-t-elle sa réputation de « prof trop cool »? Vous le saurez en lisant le prochain épisode de Ngozi's Anatomy!

LIFTING IN BURUNDI


Les transports sont l'un des éléments les plus marquants du Burundi. Pour vous présenter le panel le plus complet possible de ce trait remarquable, laissez-moi vous guider du plus gros au plus petit.

LES ÉLÉPHANTS
L'essentiel des biens de consommation entre et sort du Burundi à bord de camions tanzaniens bigarés, et il faut bien l'admettre, un peu kitch, à l'image des camions indiens. Souvent surchargés, tant par les marchandises en tout genre qu'ils transportent que par les gamins qui sautent à l'arrière pour aider à décharger et gagner ainsi leur pitance quotidienne, ces camions ont une fâcheuse tendance à traverser les villes et villages à 150 km/h, manquant chaque fois d'écraser sauvagement vélos et piétons qui ont le malheur de se trouver sur leur passage! A cette vitesse, dans les virages en épingle à cheveux qui parsèment les routes burundaises, de nombreux camions se renversent.

Les accidents de camions, notamment ceux qui transportent de la bière (Primus et Amstel), sont un véritable événement dans les villages. Quelques secondes après s'être retourné, le camion est assailli par des dizaines de paysans qui improvisent sur place une sorte de cabaret informel et épuisent le stock de boissons en quelques heures, le temps que la police arrive sur les lieux!

LES CHARETTES
Les autobus burundais sont en général des camionettes 18 places, en réalité raremement occupés par ce nombre exact de personnes! On les appelle des « yas ». C'est le mode de déplacement le plus commun et le plus abordable pour aller d'une ville à l'autre, mais ce n'est clairement pas le plus rapide ni le plus confortable.

En effet, ici, on optimise le déplacement et l'espace du véhicule, ce qui signifie que le bus ne démarre pas tant qu'il n'est pas plein comme un oeuf. Le yas fait donc plusieurs fois le tour de la ville à la recherche de passagers, avant de se décider à prendre la route. A l'intérieur, les biens les plus inattendus s'amoncèlent: valises, sacs de riz, de haricots et d'oigons, poulets vivants, etc. Et sur le parechoc avant, il n'est pas rare de voire se balancer quelques mukekes et sangalas (poissons du lac Tanganyika), ce qui leur confère ce petit goût unique au monde! Sur la route, même principe: on s'arrête tous les 20 mètres pour prendre un nouveau passager ou pour que l'un des passagers à bord achète un régime de bananes ou un sac de pommes de terre.

Tout cela vous semble bien folklorique, je n'en doute pas, mais c'est sans compter sur le mal qui frappe nombre de burundais: celui des transports. En effet, il arive souvent que votre voisin rende son déjeuner dès les 20 premières minutes de voyage et ce jusqu'à l'arrivée. Mais rassurez-vous, les burundais savent se tenir, ils vomissent souvent dans leur sac pour ne pas vous incommoder!

LES BOEUFS
Le parc automobile burundais ressemble à celui de presque tous les pays d'Afrique: de vieilles voitures décharnées en provenance d'Europe, au kilométrage titanesque et aux intérieurs improbables, et de gros 4x4 pick up, parfois propriétés des quelques rares burundais millionnaires (en Francs Bu, bien sûr!) ou de l'administration, mais plus généralement outil de travail de la coopération internationale. Entre les deux, on trouve les Corolla japonaises des taxis, souvent ornées sur leur pare-brise avant et arrière d'autocollants géants glorifiant le nom de Dieu. Là encore, même principe que pour le yas, pas de gaspillage: lors que vous prenez un taxi pour aller d'une ville à l'autre, c'est souvent avec 3 ou 4 inconnus et le coffre plein de marchandises diverses et variées.

L'autostop est aussi une pratique très répandue au Burundi. On appelle cela « trouver un lift ». Et contrairement aux idées reçues, les burundais se prêtent volontiers à cette pratique. Nous même, comptant parmi les professeurs privilégiés de l'université qui disposent d'un véhicule, nous sommes souvent sollicités pour déposer un collègue sur le chemin.

LES BROUETTES
Comme en Chine, le moyen de transport emblématique du Burundi, c'est le vélo! D'abord avec les taxi-vélos, que l'on trouve en bande à presque tous les coins de rue, réunis autour de bornes informelles, et qui, moyennant quelques centaines de francs, suent sang et eau pour vous amener n'importe où en ville. Ils sont réputés pour conduire très dangereuseument et être à l'origine de nombreux accidents. Une de mes étudiantes a d'ailleurs failli y laisser un orteil! A Bujumbura, comme la ville est plus étendue, les taxi-motos leur font concurrence.

A la campagne et sur les routes, le vélo sert surtout à transporter toutes sortes de marchandises: des bottes de foins aux sacs de charbon, vous n'imaginez pas tout ce qui tient sur un deux-roues. Et les pauvres bougres qui poussent leur vélo surchargé comme ils pousseraient un âne mort font sans conteste partie du paysage. Cela n'est pas très étonnant quand on sait qu'en dehors des 3 ou 4 routes principales du pays et des 2 ou 3 rues principales de chaque ville, toutes les autres voies du Burundi sont en terre battue, diablement pentues et donc difficilement accessibles aux véhicules.

... ET MARCHER AVEC SES PIEDS!
Mais ici, compte tenu du relief montagneux, des difficultés d'aménagement du territoire et de l'enclavement des villages, la meilleure façon de se déplacer, c'est encore avec ses pieds. Malgré l'absence de trottoir en ville et de bas-côté sur les routes, les Burundais, surtout les paysans, font des kilomètres tous les jours pour aller aux champs, chercher de l'eau, faire des courses, se faire soigner, etc. Hommes, femmes, enfants, souvent chargés de panier dignement portés sur la tête à l'aide d'une sorte de turban en feuilles de bananes, grimpent avec agilité les collines escarpées qui couvrent le pays.