Ma
vie quotidienne à la maison, j'aurais dû la raconter il y a bien
longtemps. L'occasion ne s'était pas présentée...avant
aujourd'hui !! Pour me rattraper, laissez-moi vous parler de ces
multiples bonheurs et tracas qui font qu'on se sent si bien chez
soi !
LA COLOCATION
La
colocation, ce n'est pas facile tous les jours ! Une lapalissade
me direz-vous ? C'est vrai, mais il faut avouer qu'au cœur de
l'Afrique, cela prend une toute autre dimension.
Il
faut d'abord compter avec le fait qu'ici, on ne choisit pas vraiment
ses colocataires. En l'occurrence, à Ngozi, il y a une maison pour
les professeurs volontaires de l'université où nous sommes tous
tenus de vivre. Or autre lapalissade : on n'est pas tous fait
pour vivre ensemble, même avec des gens qu'on apprécie beaucoup,
surtout lorsque l'on vit, on sort et on travaille tous ensemble. Les
relations deviennent tout de suite beaucoup plus (trop) intenses et
il est difficile de trouver des espaces de décompression. C'est un
peu LOFT STORY, avec les caméras et surtout la piscine en moins !
;-)
De
fait, même si les horaires de travail et de sortie (par la force des
choses puisque la plupart des bars ferment à 22h) sont les mêmes,
les colocs ne vivent pas nécessairement au même rythme. Essayer de
vivre à la cool dans un maison où l'un des colocs est très
pointilleux sur l'organisation ou l'hygiène n'est pas toujours aisé.
Vice versa : l'insouciance des uns peut déranger
l'hyperactivité et le perfectionnisme des autres, en particulier
lorsque l'on n'a personne (ou presque) pour s'occuper de la maison.
LA DOMESTICITÉ
Les
« grooms », parlons-en ! Chez nous, hormis le
cuisinier – Pierre – qui vient 3 matins par semaine depuis 1
mois, nous n'avons que notre vieux « zamu » (gardien)
Julien, qui vit à la maison et la garde du coup 24h/24h. Il s'occupe
aussi du jardin, du ménage du sol dans la maison et de la lessive
(on n'a pas de machine à laver le linge, bien entendu!) pour un
salaire mensuel de 60 000 Bif (37 euros). Certains amis en provenance
de l'Europe et qui sont passés par ici ont été troublés par les
conditions de vie de ce pauvre monsieur d'un soixantaine d'année.
Pourtant,
c'est bien Julien, père et grand-père, chef de famille, qui a
souhaité venir s'installer à la maison – qu'il ne gardait
auparavant que le jour – lorsque notre gardien de nuit est parti.
Pour lui, c'était une aubaine : il doublait son salaire et
n'avait plus à payer le loyer de la chambrette qu'il louait en
centre-ville. Il est logé de façon très spartiate, c'est vrai,
mais dans une bâtisse en dur, quand la plupart des gardiens ici sont
logés dans des cabanes en roseaux ou en toile. Sans compter que les
nouveaux colocs viennent de lui offrir une porte, qu'il jouit
gratuitement de l'eau courante extérieure, et que depuis 1 mois et
demi, on a installé l'électricité dans sa petite cahute (notez que
80% de la population burundaise n'a accès ni à l'électricité, ni
à l'eau courante). Enfin, son salaire est très largement supérieur
à celui des gardiens du voisinage (entre 15 et 30 000 Bif par mois
maximum). Seules les compagnies de gardiennage paient parfois – pas
toujours – plus.
Bref,
malgré l'indignation de mes compatriotes, j'affirme sans honte que
notre gardien est plus que convenablement traité. Le choyer
davantage risquerait de lui attirer des jalousies, et de fait,
beaucoup d'ennuis. Je dois aussi ajouter que plus les « bazungu »
traitent beaucoup mieux leurs gardiens que les autres, sans se
préoccuper de la façon dont les gens vivent ici, plus ils
entretiennent cette idée que les blancs ont beaucoup d'argent, dont
ils n'ont que faire, et que c'est bon de les faire banquer. Les
Burundais ne sont pas fous : si les blancs paient
systématiquement plus que les Burundais, ils n'iront plus se faire
embaucher chez leurs compatriotes, ou ils demanderont plus cher à
des familles qui n'auront pas les moyens de payer. Ceux qui n'auront
pas trouvé leur place chez un blanc refuseront alors de travailler
pour un salaire plus faible, et préféreront ne rien faire... Je
crois que je n'ai jamais aussi bien compris l'adage « L'enfer
est pavé de bonnes intentions » qu'avec la façon de traiter
les gardiens ici au Burundi.
LA CUISINE
Le
dernier aspect de la vie à la maison, c'est évidemment la
nourriture ! Ceux qui me connaissent savent que c'est un loisir
et un plaisir de tout premier ordre pour moi ! Si vous êtes un
fidèle de ce blog, vous aurez déjà eu un aperçu de la gastronomie
burundaise et de la diversité de l'offre de restauration ici à
Ngozi. Alors vous aurez compris que l'envie d'aller au restaurant est
moins pressante qu'à Bujumbura ou à Paris ! De même, si vous
êtes pressé, mieux vaut éviter le resto, où il n'est pas rare
d'attendre une heure (et jusqu'à une heure et demie) pour obtenir
son plat.
Alors
on se met à la cuisine ! Vous n'imaginez pas les progrès que
j'ai fait dans ce domaine depuis que je suis arrivée au Burundi,
c'est inouï : pancakes, gnocchis, dulce de leche, curry de
poisson, etc. Je suis devenue une cuisinière hors pair (sans me
vanter bien sûr!). Le seul problème, c'est que les marchandises peu
diversifiées et les horaires d'ouverture restreints des kiosques à
Ngozi oblige à un minimum d' « anticipation », au
risque de se retrouver l'estomac vide à 22h parce qu'on n'a rien
prévu pour dîner et que tout, restaurants y compris, est fermé.
Par
ailleurs, ici, pas de plats préparés, ni même de chips ou de
boîtes de conserve. Il faut tout (ou presque) acheter frais et tout
cuisiner. La cuisine devient alors vite chronophage, alors même que
certains soirs, en rentrant épuisés du travail, on n'a qu'une seule
envie : se mettre en pyjama et déguster une blanquette de veau
déjà préparée et rechauffée au micro-ondes et une soupe en
brique, le tout devant un bon film. Voilà une situation qui vous
transforme rapidement en véritable machine à planifier : les
menus, les courses, les tâches ménagères...ça n'en finit plus !
C'est que cela semble la seule façon de préserver un peu son
confort. Les anciens se sont déjà adaptés, mais les nouveaux venus
ont tendance à se sentir un peu agressés par si peu
d'improvisation.
Voilà,
vous savez l'essentiel ! La vie à la maison, c'est pas tous les
jours dimanche, mais on ne peut pas trop se plaindre non plus quand
on vit dans un 200m2 avec un petit jardin plein de basilic et de
menthe, une terrasse couverte, un hamac et un super transat !
Home sweet home !